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Les génocides dans l'histoire

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Personne à contacter Les génocides dans l'histoire

Message par Sphinx Lun 8 Mar - 23:03

Génocide arménien

Le 24 avril 1915 : une rafle


Le 24 avril 1915, le gouvernement turc procède dans la nuit à l'arrestation de toutes les personnalités arméniennes intellectuelles et politiques de Constantinople : 500 ou 600 pour les uns, 200 pour les autres, certainement au moins 235, chiffre retenu et publié plus tard par le gouvernement turc lui-même. Ces hommes sont d'abord jetés en prison, puis déportés ; « bien entendu, dit Talaat devant un diplomate allemand, parmi les déportés beaucoup sont tout à fait innocents16 ». Bien peu survivront à l'été. Cette rafle ouvre pour les Arméniens une période de déportations systématiques qui tend finalement, à partir des provinces où la guerre se déroule, à l'élimination complète de l'élément arménien du territoire turc. En deux ans, plus d'un million de personnes trouvent la mort dans des conditions horribles de barbarie, histoire inimaginable en un temps d'idéalisme encore triomphant. Ainsi se trouve achevé le processus qui avait fait venir au jour la question arménienne dans les années 1880 : les 100 000 morts des grands massacres de 1895, les supplices quotidiens, tout cela aboutit, à l'ombre de la Grande Guerre, à cette extermination si visible dans les statistiques de la jeune République turque où l'on ne signale en 1927, parmi les minorités vivant en Turquie, que 64 000 Arméniens. Où sont donc passés tous les autres ?

Avant que se déclenche le génocide, bien des signes ont encore montré, et de loin, qu'il n'était plus temps de croire à l'union des peuples de Turquie. La seule succession chronologique de quelques dépêches de l'ambassade russe est à cet égard amplement révélatrice :

20 décembre 1913 : « Les manifestations arméniennes à l'occasion des élections au Parlement dans la ville d'Erzeroum ont déclenché une nouvelle vague de haine chez les musulmans, donnant lieu à des réunions secrètes dans toutes les maisons des Unionistes. Le club unioniste, sous la présidence du commissaire Ahmed Hilmi bey, mène une campagne active antiarménienne... Tout indique une intense préparation de troubles. Parmi les Arméniens, certains craignent que l'Allemagne ne cherche à escamoter les réformes par des troubles ; d'autres, qu'on cherche à instaurer le désordre lors de la mise en application des lois élaborées par les Puissances. »

11 janvier 1914 : «Non seulement des réunions secrètes ont lieu partout à Erzeroum, mais on commence à parler ouvertement de massacre d'Arméniens. Sur ordre du mollah, les musulmans se mettent à porter sur la tête des turbans blancs. Selon les bruits qui courent, tout est prêt pour le massacre, on n'attend plus que le signal de la capitale... »

20 septembre 1914 : « Le 18 septembre, de grandes manœuvres ont commencé le long de la frontière russe. Les musulmans reçoivent des armes en vue d'un massacre imminent d'Arméniens. En raison de l'abrogation des Capitulations, ils seront même poursuivis dans les locaux du consulat où ils se cacheront. »

11 octobre 1914 : « Les autorités de Bayazid ne cessent de distribuer des armes à des bandes de brigands. Les Arméniens apeurés partent en Russie, craignant le massacre qu'ils attendent de jour en jour. »

Autre signe de la dégradation de la situation, la mobilisation à laquelle procède dès le mois d'août le gouvernement : elle vise tous les hommes valides de vingt à quarante-cinq ans — chrétiens comme musulmans — et elle s'accompagne d'une réquisition officielle sur l'ensemble du territoire de tout ce qui est nécessaire au bon fonctionnement de l'intendance : bêtes de somme, approvisionnements, fournitures, vêtements, etc. Le processus est normal, mais il vise de fait toutes les possessions des chrétiens, et particulièrement des Arméniens que l'on dépouille systématiquement. Les fonctionnaires chargés de l'opération ne se cachent d'ailleurs pas, puisqu'ils s'emparent aussi bien de vêtements de femmes ou d'objets de consommation courante sans rapport avec les besoins militaires — et on les retrouve un peu plus tard dans d'autres vitrines de commerçants.

Un témoignage allemand le confirme clairement : « Vers la fin d'octobre 1914, dès le début de la guerre turque, les fonctionnaires turcs commencèrent à enlever aux Arméniens tout ce dont ils avaient besoin pour la guerre. Leurs biens, leur argent, tout fut confisqué. Plus tard, chaque Turc était libre d'aller dans un magasin arménien et d'y prendre ce dont il avait besoin, ou qu'il désirait avoir. Le dixième environ était peut-être nécessaire pour les besoins de la guerre, quant au reste, c'était simplement du vol. » Quoique cela soit pénible, on peut penser qu'il ne s'agit là que de l'habituel comportement à l'égard des chrétiens, dont nous avons bien vu que la révolution ne l'avait qu'à peine, et pour un court moment, freiné ; et les Arméniens le prennent bien ainsi, qui subissent avec une résignation également habituelle ce nouvel avatar de leurs rapports avec l'élément musulman. De la même façon, la proclamation en novembre du Djihad n'a eu pour effet à Constantinople qu'une grande manifestation musulmane qui se termine par le bris de toutes les vitres d'un grand hôtel de la ville : Tokatlian, propriété d'un Arménien.

Les mois d'hiver qui suivent voient le début assez lent des opérations militaires : du fait de son entrée en guerre aux côtés de l'Allemagne, la Turquie se trouve à la fin de 1914 engagée sur plusieurs fronts face aux Puissances de l'Entente. Contre l'Angleterre : dans le golfe Persique (Bassorah), et sur le canal de Suez où Djemal sera arrêté dans l'expédition vers l'Egypte qu'il tente à partir de la Syrie, où il s'est installé à la tête de la IVe armée. Contre la Russie, l'ennemie traditionnelle, sur deux fronts également : en Perse, dans la région de Tabriz que les deux camps convoitent ; et au Caucase, où, après avoir stoppé l'offensive russe, les troupes turques ne parviennent pas à progresser. Elles vont même subir là, en janvier 1915, une défaite assez lourde pour permettre bientôt une nouvelle offensive russe.

Pour la population arménienne, les événements qui suivent pendant ce temps la mobilisation et les réquisitions sont encore plus inquiétants. Par un décret du début de 1915, le gouvernement a en effet décidé de retirer tous les soldats arméniens des troupes armées pour les verser dans des corps annexes de travailleurs, où ils sont affectés à des tâches diverses : construction de routes, fortifications, chemins de fer, transports à dos d'homme, etc. En réalité, le but visé est de leur retirer les armes dont ils pourraient disposer en tant que soldats. Parallèlement, et dans tout le pays, on demande officiellement à leurs compatriotes, c'est-à-dire à tous ceux qui sont restés chez eux, de rendre les armes qui peuvent être en leur possession : c'est exactement le procédé utilisé à la veille des massacres de 1895 — et sa mise à exécution s'accompagne des mêmes violences : perquisitions, arrestations, etc. Et comme en 1895, les Arméniens en viennent à racheter à leurs voisins des armes qu'ils pourront donner aux enquêteurs*... Rien ne saurait mieux prouver leur calme et leur éternelle soumission à l'autorité.

Et pourtant, si le gouvernement cherche ainsi à les désarmer, ce ne peut être que pour deux raisons : ou bien il craint une insurrection arménienne et il veut donc s'assurer qu'il ne court aucun risque de ce côté. Mais, de retour d'une inspection sur le front du Caucase, Enver a publiquement fait état, en février 1915, de l'excellent comportement des soldats arméniens, dans une déclaration reproduite par l'Osmanischer Lloyd, journal de Constantinople en langue allemande. Répondant à une lettre de l'évêque de Konia, il dit : « Je profite de cette occasion pour vous dire que les soldats arméniens de l'armée ottomane ont rempli scrupuleusement tous leurs devoirs sur le champ de guerre, ce dont je puis témoigner personnellement. Je vous prie d'exprimer toute ma satisfaction et ma reconnaissance au peuple arménien dont le parfait dévouement au gouvernement impérial ottoman est bien connu. » Ou bien, c'est qu'il se prépare, lui, à une action d'envergure contre la population arménienne et qu'il veut être par avance assuré de ne rencontrer aucune résistance : déjà les hommes valides de vingt à quarante-cinq ans ont été retirés de leurs foyers et ils sont rassemblés dans des bataillons sans armes loin de leurs provinces d'origine ; avec la confiscation des armes sur place, il ne reste donc dans les villes et les villages que des femmes, des enfants, des vieillards sans aucun moyen de défense.

En février également, c'est là-dessus que met l'accent une note adressée à Talaat, toujours ministre de l'Intérieur, par un député arménien de Van, Dertzakian-Vramian, qui est de surcroît membre du Comité Union et Progrès (il sera lui aussi assassiné) : « II est indéniable que les relations entre le gouvernement et la nation arménienne sont devenues anormales au cours des derniers mois. Le gouvernement n'y fait aucune attention et les efforts déployés, après les tristes événements de Gavache et de Gardjikan, en vue de les « améliorer », ont échoué. Depuis mon arrivée à Van, j'ai exposé à plusieurs reprises, de vive voix, ainsi que par écrit, aux autorités locales, les mesures qui seraient nécessaires pour améliorer cette situation. Mes convictions s'étant trouvées confirmées depuis par de nombreux arguments, je prends la liberté d'attirer l'attention du gouvernement central sur les questions suivantes.

« Les causes de cette situation anormale sont au nombre de quatre, découlent l'une de l'autre, et s'expliquent l'une par l'autre. Savoir : 1° Le désarmement des soldats et des gendarmes arméniens. 2° La réapparition d'événements de nature à menacer l'existence de la nation arménienne. 3° La question des déserteurs arméniens. 4° La déclaration de « Djihad », qui explique les désertions d'Arméniens, survenues après la mobilisation générale, désertions qui ont trois raisons, à la fois sociales et religieuses : a — Les Arméniens au-dessus de vingt-quatre ans ne connaissaient pas le maniement des armes. b — Ils n'étaient pas habitués aux privations imposées dans l'armée après la déclaration de la guerre. c — Leurs besoins religieux étaient négligés dans l'armée.

« Si on prend en considération, en temps voulu, les causes qui provoquent les désertions, on pourra, par des mesures appropriées, empêcher graduellement ces désertions. Au lieu de cela, la méfiance regrettable du gouvernement vis-à-vis des Arméniens d'une part, et, d'autre part, les événements menaçant l'existence de ceux-ci, donnent une apparence politique mauvaise à la question de la désertion. Ainsi : 1° Le désarmement des soldats et des gendarmes arméniens, en créant une méfiance politique autour de la nation arménienne, a provoqué une tension dans les relations entre les Arméniens et les Turcs. 2° En désarmant les Arméniens on les a réduits pour ainsi dire au rôle de bêtes de somme, et on a blessé ainsi grièvement leur amour-propre national. 3° Les Arméniens désarmés ayant été mis sous la surveillance de musulmans armés, ou bien étant obligés de circuler parmi eux, voyaient leur vie exposée à de sérieux dangers. Ainsi, le bruit court avec persistance que des centaines de soldats arméniens ont été noyés, fusillés ou poignardés dans l'armée, surtout aux environs d'Erzeroum et de la frontière persane. 4° Les Arméniens désarmés ont été expulsés de leur pays et déportés dans des localités inconnues. 5° Sous le prétexte de former une milice, des Kurdes et des Turcs, entre seize et soixante ans, ont été armés et nommés agents de police ou gendarmes, et transformés ainsi en un pouvoir exécutif vis-à-vis des Arméniens. 6° Lesdits miliciens ont ravagé les villages arméniens... 7° Des brigands connus comme Mehmed-Emin et Moussa-Kassim bey ont été graciés et autorisés à revenir dans leur village ou dans des villages arméniens. 8° Par suite de la désertion de nombreux Kurdes, un grand nombre de villages, surtout dans les montagnes, ont été envahis par des déserteurs kurdes. 9° Des régiments Hamidiés ont été campés dans les villages arméniens et y ont commis de nombreux méfaits... 10° Les Arméniens de Bachkalé et ceux des villages des environs ont été massacrés. (Ceci a été confirmé malgré les démentis officiels.)

« Telles sont les causes qui amènent les Arméniens à étudier la question de défendre leur honneur, leurs vies et leurs biens, tandis que le gouvernement a fait connaître officiellement sa méfiance envers eux en les mettant dans une situation critique envers leurs voisins armés et à demi-sauvages. Etant donné que cette défense de l'honneur, de la vie et des biens, est un droit naturel et sacré, le gouvernement poursuit une politique néfaste en gardant les Arméniens désarmés sous les drapeaux. Non seulement, en effet, la patrie ne profite pas du service de ceux-ci, mais, en les gardant, le gouvernement expose leurs familles sans défense à de réels dangers, car elles sont constamment à la merci des caprices sanguinaires de leurs voisins armés et à demi-sauvages. Il est évident qu'il serait injuste d'employer le terme de désertion pour les Arméniens à qui on a repris leurs armes — qui, pour un soldat, équivalent à la vie — et du moment que les musulmans, eux-mêmes, désertent en dépit de la déclaration de « Djihad ».

« Etant donné les raisons politiques, religieuses et sociales exposées ci-dessus... je prends la liberté d'attirer l'attention la plus sérieuse du gouvernement sur les propositions que voici : 1° Ne maintenir sous les armes que les Arméniens âgés de vingt et un à vingt-cinq ans, qui ont déjà été exercés dans l'armée. 2° Garder les Arméniens dans le rayon de leur pays et dans la gendarmerie jusqu'au rétablissement complet de la confiance réciproque entre le gouvernement et les Arméniens. 3° Percevoir une taxe d'exonération modérée et seulement pour la durée de la guerre actuelle sur les Arméniens au-dessus de vingt-quatre ans (non exercés). 4° Punir, suivant les dispositions les plus sévères de la loi, les meurtriers de Bachkalé, d'Akhorik et de Khouzérik. 5° Mettre en vigueur, le plus tôt possible, les règlements des garde-villages admis sous Tahsim bey. 6° Permettre aux Arméniens le port d'armes jusqu'au désarmement des Kurdes sauvages. 7° N'octroyer aucune fonction de la force publique aux miliciens et ne pas les autoriser à séjourner dans les villages arméniens et ne les armer qu'à leur arrivée au quartier général. 8° Indemniser les sinistrés arméniens. 9° Rechercher et restituer les biens des églises arméniennes pillées. 10° Rendre à leurs familles les jeunes filles et les femmes enlevées, et rendre au sein de leur église les Arméniens convertis par force et par crainte à l'islamisme.

« Mes propositions sus-mentionnées ont pour but de mettre fin à la situation anormale actuelle, d'assurer aux Arméniens leur existence, et de rétablir leur confiance envers le gouvernement, car les mesures très sévères prises sans nécessité par les autorités locales rappellent les temps des années 1895-1896.

« Je m'empresse donc de vous prier d'accueillir favorablement et de faire approuver par Iradé Impérial et Viziriel, les revendications minimes de la nation arménienne.

« On pourrait, à cet effet, convoquer les patriarches arméniens à Constantinople. »

Mais il est déjà trop tard sur le plan politique. Les dirigeants du Comité ont renié leurs amitiés arméniennes et la vieille complicité des révolutionnaires n'est plus : après la démission d'Oskan en octobre 1914, Couyoumdjian, gouverneur du Liban depuis février 1912, a été démis de ses fonctions à la fin de l'année ; et en juillet 1915, il n'y aura plus d'Arméniens dans les corps de fonctionnaires de l'Etat. Dès à présent, les principaux chefs du parti Dachnak sont pratiquement assignés à résidence à Constantinople et leur journal Azadamard est supprimé le 31 mars. Tout est prêt pour la rafle du 24 avril. Dès le 21, des arrestations identiques ont commencé dans les villes de province où elles touchent les notables arméniens par centaines ; ces arrestations se poursuivront durant plusieurs semaines, et pourtant certains chefs de la communauté veulent espérer encore... Krikor Zohrab, un de ceux qui ont cru à la Turquie nouvelle, un de ceux qui ont tout fait pour la construire avec le Comité, lui-même arrêté un peu plus tard, écrit à sa femme, d'Alep où il est gardé depuis vingt-deux jours, deux lettres bouleversantes, toutes deux du 15 juillet. Voici la deuxième :

« Jeudi soir.

« Mon âme adorée, on nous avait dit que nous devions partir samedi, et j'avais préparé deux lettres pour toi. On nous dit maintenant que nous allons partir vendredi, c'est-à-dire demain matin. Il paraît que le train partira demain. Que pouvons-nous faire ? Il en sera ainsi.

« Après avoir montré la lettre ci-jointe à Halil bey et pris son avis, toi et tes filles, allez voir ensemble Talaat, chez lui ou à son bureau. Si vous allez à son bureau, il vaudrait mieux que Halil bey soit là aussi. Donne-lui la lettre et supplie-le. S'il te donne la promesse ferme de sauver ton mari, adresse-moi le télégramme suivant : « Nous sommes tous en parfaite santé, sois toi aussi tranquille**. » Ici, j'ai écrit une lettre à Talaat par l'intermédiaire du vali Bekir Sami bey. Je ne sais pas s'il l'a reçue ou non, il devait la recevoir avant la tienne. Je vous embrasse encore. Priez.

« J'ai mis mon testament dans cette lettre. Ne soyez pas émues. K. Z.***»

Mais il sera assassiné comme les autres, ainsi que le rapporte dès le 27 juillet le consul allemand à Alep : « Les célèbres députés Zohrab et Vartkès, expulsés de Constantinople, sont restés quelque temps à Alep. Ils savaient qu'ils allaient mourir si l'ordre du gouvernement de les déporter à Diarbekir était exécuté... Ce que racontent les gendarmes qui les accompagnaient et qui sont revenus ici, à savoir qu'ils ont rencontré des bandits qui, par hasard, ont tué justement les deux députés, ne laisse subsister aucun doute : le gouvernement les a fait assassiner entre Ourfa et Diarbekir


Dernière édition par Toufik le Lun 8 Mar - 23:24, édité 1 fois
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Personne à contacter Re: Les génocides dans l'histoire

Message par Sphinx Lun 8 Mar - 23:05

Avant même la date fatidique du 24 avril, les premières péripéties de la guerre donnent un relief particulier à des affrontements armés où les Arméniens sont impliqués en plusieurs endroits. Bien qu'il ne s'agisse généralement pour eux que de résister à l'aggravation des violences, leur lutte prend l'apparence d'un soulèvement qui va brouiller les cartes et permettre au gouvernement turc de justifier l'action qu'il mènera contre la population arménienne.

A Zeitoun, encore une fois, des heurts se produisent à la fin du mois de mars, après un hiver tendu marqué par d'inévitables et habituelles violences des gendarmes turcs — et ce, malgré la soumission complète des habitants à la mobilisation et à la remise des armes. A la suite d'un viol, quelques Arméniens se révoltent et le gouvernement peut faire intervenir la troupe : la ville est assiégée et les notables arrêtés par surprise.

Mais c'est à Van surtout qu'ont lieu les événements essentiels : une bataille y oppose en effet pendant un mois à partir du 20 avril la population des quartiers arméniens aux troupes turques et kurdes qui — tous les récits neutres en font foi — se préparent au massacre de cette population chrétienne qui vit depuis toujours à côté de la population musulmane dans une partie distincte de la ville. Ici, comme dans les autres villes, la recherche des armes s'est accompagnée déjà de grandes violences qu'encourage de fait Djevdet, beau-frère d'Enver et gouverneur de la région. Après quelques massacres dans les villages avoisinants, massacres annonciateurs des événements, les Arméniens se préparent, comme en 1896, à la résistance : quand Djevdet lance ses troupes à l'attaque du quartier arménien, celui-ci est en état de défense et subit un véritable siège contre une armée équipée de canons. Le gouvernement turc va donc pouvoir s'appuyer sur la « révolution » de Van (les guillemets sont de l'ambassadeur américain41) pour justifier son action : pour des raisons de sécurité militaire, il faut évacuer toutes les personnes susceptibles de présenter un danger pour les troupes — subversion politique, plus tentative de sécession, plus collaboration avec l'ennemi russe : tel sera l'argument.

Et pourtant, les documents montrent qu'à Van, il n'y a pas eu complicité préméditée entre les Arméniens et les Russes. C'est Aram, un des chefs arméniens, qui déclare en accueillant le commandant des troupes russes après la délivrance : « Lorsqu'il y a un mois, nous prîmes les armes, nous ne comptions pas sur l'arrivée des Russes. Notre situation était alors désespérée. Nous n'avions qu'un choix à faire : ou nous rendre et nous laisser égorger comme des moutons ou mourir en combattant les armes à la main. Nous préférâmes ce dernier parti. Mais nous avons reçu de vous un secours inattendu et maintenant c'est à vous qu'à côté de la vaillante défense des nôtres, nous devons notre salut!37 » Et Sazonov, du côté russe, confirme cette version dans une dépêche de mai à son ambassadeur à Londres : « Il est évident que le soulèvement des Arméniens a été causé par les massacres et non l'inverse : cela n'avait pas de sens pour eux de commencer un mouvement de révolte contre les forces turques, très nombreuses, avant l'arrivée de nos troupes.
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Personne à contacter Re: Les génocides dans l'histoire

Message par Sphinx Lun 8 Mar - 23:09

« La Sublime Porte, retombant dans la tolérance, patienta pendant plusieurs mois, ce qui, on voudra bien l'admettre, était le comble de la longanimité. Finalement, elle vit que le salut du pays exigeait d'elle des mesures promptes et décisives. Elle n'hésita plus. Elle fit dissoudre les Comités arméniens et arrêter leurs chefs. Elle ordonna des perquisitions dans les établissements publics des Arméniens et dans leurs résidences privées, ce qui eut pour résultat de faire convaincre des centaines d'entre eux de desseins et d'actes révolutionnaires. Les coupables furent condamnés aux peines qui ont cours dans tout pays où existe la notion de la sécurité de l'Etat. Les suspects furent emprisonnés par mesure de précaution et la population arménienne dans son ensemble soumise à de sévères restrictions en matière de déplacement. Tout cela faisait partie du cours naturel et élémentaire des choses. Mais la Sublime Porte eut en même temps recours à un remède héroïque : la transportation à l'intérieur du pays de la population arménienne des provinces limitrophes de la Russie et de celles où un débarquement de l'ennemi était à craindre. » Un diplomate ottoman décrira ainsi plus tard les « mesures défensives du gouvernement.

L'amalgame était tentant entre les « événements insurrectionnels » et « le déplacement des Arméniens » : un rapport de cause à effet liera les deux dans une brochure officielle de 1919 ; mais, tout de suite, il est mis en avant et exploité : après avoir commencé par nier les faits, le gouvernement turc ne cessera plus de les présenter ainsi, en rejetant la responsabilité finale sur l'attitude insurrectionnelle des Arméniens, cette « trahison » qui a « nécessité « leur « déplacement ». « Le gouvernement impérial qui se trouvait en présence d'une organisation révolutionnaire s'étendant sur le pays tout entier s'est vu obligé de prendre des dispositions en conséquence.

Et il est exact, comme il le fera remarquer, que la déportation ne commence que neuf mois après le début de la guerre mondiale — et elle coïncide avec les événements de Van : 20 avril, affrontements entre troupes de Djevdet et habitants arméniens, 24 avril, arrestation des notables de Constantinople. Mais, outre le fait que les arrestations ont commencé en Anatolie dès le 21, c'est dès le début du mois que la population de Zeitoun, à l'autre bout du pays, est l'objet de mesures de déportation. On peut donc penser que les événements de Van ont bien plutôt servi de prétexte et que c'est l'échec militaire des Alliés devant les Dardanelles qui a en quelque sorte donné le feu vert pour une opération préparée de longue date, mais qui a été gardée en réserve jusqu'au moment le plus favorable pour son exécution.

Pour bien éclairer ce point capital, il faut mettre en relation trois séries de faits : l'insistance avec laquelle les dirigeants turcs rappellent qu'ils ont prévenu les députés et les autorités religieuses arméniens des « mesures draconiennes » qu'entraînerait le moindre incident en Anatolie ; la conviction sans cesse exprimée par les diplomates allemands que « la déportation des Arméniens n'est pas uniquement inspirée par des raisons militaires » et que « la manière dont s'effectue le transfert montre que le gouvernement poursuit véritablement son but qui est de détruire totalement la race arménienne dans l'Empire turc » — tout en insistant sur l'absence de commune mesure entre la « cruauté » de la déportation et ses justifications militaires, ils notent qu' « il n'existe aucune preuve qu'une révolte était projetée et organisée par les Arméniens .
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Personne à contacter Re: Les génocides dans l'histoire

Message par Sphinx Lun 8 Mar - 23:10

» ; une conversation entre Morgenthau, l'ambassadeur des Etats-Unis à Constantinople, et Talaat, où celui-ci déclare « que le Comité Union et Progrès avait examiné la question avec soin et que la politique actuelle était officiellement celle du gouvernement, ajoutant qu'il ne fallait pas croire que les déportations eussent été décidées à la hâte, mais qu'elles étaient au contraire le résultat de longues et sérieuses délibérations. »

Et l'affaire du 18 mars 1915 constitue bien un moment favorable. Certes, l'action de la France, de l'Angleterre ou de la Russie est désormais par principe annihilée du fait de leur appartenance au camp adverse, mais le gouvernement reste sous la menace d'une action directe sur Constantinople, menace obsédante depuis toujours et d'autant plus envisageable qu'à partir de janvier il apparaît que les armées turques ne pourront s'opposer à l'avance de l'Entente ni sur le golfe Persique, ni en Palestine, ni au Caucase. Dans cette situation incertaine, l'expédition franco-britannique des Dardanelles justifie soudain en février toutes les craintes turques et l'on voit bientôt le moment où les Anglais défileront dans la capitale. Tout est alors prêt, dans un étonnant climat de panique, pour la fuite des dirigeants ; mais, malgré des actions d'artillerie d'abord efficaces, les navires alliés ne parviennent pas à forcer le passage des Détroits et doivent se retirer le 18 mars après avoir subi de lourdes pertes, après avoir été aussi à deux doigts, mais sans s'en rendre compte, de réussir à franchir l'obstacle des derniers forts turcs.

Pour le gouvernement, le danger est passé et il a désormais les mains libres pour agir : l'opération, qui a commencé au début de l'année avec le désarmement des soldats arméniens et la réquisition des armes personnelles, peut continuer et passer à la phase décisive — les puissances ennemies ne pourront plus intervenir.

C'est donc dès le début du mois d'avril, avant même le 24, que commence, à Zeitoun, la déportation des populations arméniennes — et l'opération ainsi engagée se déroule en trois temps : Cilicie d'abord en avril et mai, Anatolie orientale ensuite à partir de juin, Anatolie occidentale enfin à partir du mois d'août. Officiellement, il s'agit seulement de « déplacer » les éléments suspects de la population arménienne des zones de guerre. Le gouvernement turc l'affirmera en 1916 : « (...) la nécessité primordiale d'assurer la tranquillité intérieure et la défense extérieure du Pays ont rendu indispensable l'éloignement des Arméniens des endroits où leur présence était considérée comme nuisible ; c'est ce qui nécessita leur transfert en des localités plus sûres et hors de l'influence étrangère47. » Et en 1917 : « Le déplacement des Arméniens et leur installation dans des régions d'où ils ne pouvaient ni menacer la sécurité de l'armée impériale ni troubler l'ordre public, était d'une nécessité urgente pour les autorités militaires aussi bien que pour les civiles. Aucun gouvernement ne pouvait tolérer ou admettre que, tandis que des milliers de ses enfants de toutes races et religions se sacrifiaient pour la patrie sur les champs de bataille, il y eût à l'intérieur du pays des traîtres travaillant à sa perte et à la victoire de ses ennemis. La mesure adoptée s'imposait donc comme la plus naturelle et la plus légale et tout retard apporté à son application aurait été criminel et impardonnable. »

Sur place, on rassure les personnes qui sont soumises aux mesures de déportation : il s'agit de quelque chose de provisoire, ce n'est pas la peine d'emporter ses affaires, dès que la guerre sera finie tout sera remis en ordre. Mais, comme en 1895, l'inquiétude grandit vite parmi les populations, et chacun se met à attendre l'horreur, à la pressentir, à s'y préparer. Car, à l'exception de certains points où le massacre a lieu sur place (dans le vilayet de Van par exemple, sauf quand l'avance russe fait fuir les responsables, mais aussi à Mouch et à Samsoun), et d'autres où les mesures sont très limitées et en tout cas discrètes (à Constantinople essentiellement où, après la rafle du 24 avril, la population sera en général laissée tranquille), c'est sur tout le territoire qu'on rassemble les Arméniens pour les emmener. Et la mesure les frappe aussi bien en Syrie et en Mésopotamie, qui sont pourtant la destination finale de tous les convois.

Après Zeitoun, c'est au tour de Deurt-Yol, puis de toutes les localités qui dépendent d'Adana ou de Marach ; plus tard, la déportation s'étendra aux régions d'Aintab, de Killis, d'Alep même. En même temps, la mesure atteint les vilayets d'Anatolie orientale, ces fameux vilayets où devaient enfin se réaliser les précieuses réformes que les Arméniens avaient depuis si longtemps réclamées : à Trébizonde, à Erzeroum, à Sivas, à Kharpout, à Diarbekir, à Bitlis, la population arménienne est rassemblée et exilée. Et il en va de même bien entendu dans toutes les localités qui dépendent de ces chefs-lieux : Erzindjan, Baibourt, Mersivan, Zileh, Malatia, Chabin-Karahissar où quelques centaines d'Arméniens résistent pendant une quinzaine de jours dans la citadelle de la ville avant d'être tués comme les autres. En Anatolie, enfin, où les Arméniens sont nombreux à Ismidt, à Brousse, à Aïdin, à Angora, à Konia, à Kastamouni, c'est pendant l'été que s'effectue la déportation. Bien entendu, les innombrables villages « abandonnés » par les Arméniens sont immédiatement occupés par les Turcs ou par les Kurdes, mais souvent aussi incendiés et détruits ; et, quand le massacre a lieu sur place, il n'y a d'espoir que dans la fuite : des milliers d'Arméniens réussissent ainsi à gagner le Caucase où ils vivront plus tard et l'espérance du salut sous l'occupation russe et de nouveaux massacres à partir de 1917.
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Message par Sphinx Lun 8 Mar - 23:11

En quelques endroits les Arméniens sauront opposer la même résistance qu'à Chabin-Karahissar ; mais, utilisant la dénonciation des révolutionnaires avec la même habileté qu'en 1895 et 1896, le gouvernement turc saura exploiter cela aussi contre eux dans sa propre défense : « Le Gouvernement tenait beaucoup à opérer ces déplacements aussi régulièrement que le permettait la situation militaire. Les premiers transports se firent en plein ordre, mais bientôt apparurent partout des bandes arméniennes armées qui, sous prétexte d'arracher leurs coreligionnaires des mains des Turcs, s'attaquèrent aux gendarmes qui les escortaient et les massacrèrent sans pitié, causant ainsi la dispersion des convois et leur malheur... L'intervention des bandes révolutionnaires lors du déplacement des Arméniens causa à ceux-ci plus de mal que de bien. »


Car cette déportation, ce n'est rien d'autre que la mise en œuvre du génocide, immense opération à laquelle ont nécessairement participé tous les fonctionnaires civils et militaires de l'Etat, étendue à partir de la Cilicie et des vilayets d'Anatolie orientale à tout le territoire, étalée du mois d'avril jusqu'au mois de novembre pour sa plus grande part mais persistant malgré tous les démentis pendant deux ans de façon ininterrompue. Il n'y aura plus ensuite, si l'on peut dire, que des massacres occasionnels. Et il faudra beaucoup de temps pour que la vérité soit, sinon connue, au moins entrevue, sur l'ampleur de l'opération ; car, comme en 1895 encore une fois, tout est fait pour empêcher l'information de circuler : la censure est totale et les seules nouvelles qu'on laisse passer ne concernent que les opérations militaires, quand elles sont favorables. Un témoin étranger dira : « Il est étrange qu'on puisse vivre constamment en Asie mineure et voir très peu de crimes qui s'y perpètrent actuellement. Lorsqu'on voyage à travers la contrée, on sent constamment le silence mortel d'une situation entourée de crimes qui vous est cachée.»
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Message par Sphinx Lun 8 Mar - 23:13

« Avec la plus grande modération et équité »

Pour en arriver là, et bien que le début de l'année 1915 soit marqué comme la fin de 1914 par une aggravation très sérieuse de la situation de la population arménienne, il a fallu un véritable changement de politique : non plus seulement laisser l'oppression quotidienne se développer un peu plus à la faveur des diverses mesures générales liées à l'état de guerre, mais activement organiser ce que le gouvernement turc nomme « le déplacement » des Arméniens. Que les mesures prises en chaque point du territoire ne soient en effet que l'application, partout la même, de décisions prises à Constantinople, cela ressort de tous les textes dont on dispose, témoignages, décrets gouvernementaux ou instructions officielles. De toute façon, ce n'est certainement pas par l'effet d'une coïncidence que les fonctionnaires du gouvernement ont partout mis en œuvre la déportation de l'élément arménien suivant le même processus à étapes ; ce n'est pas non plus par hasard que la population musulmane a participé aux opérations, surtout dans ses éléments irréguliers, tant par le meurtre que par le pillage.

C'est d'ailleurs ce qu'indiquent sur place aux agents diplomatiques allemands les valis, tel celui d'Erzeroum, qui déclare que « c'était le commandement suprême militaire et non lui-même qui était responsable et qu'il ne faisait qu'exécuter ses ordres ». Mais le gouvernement revendique de lui-même cette responsabilité et Enver s'en explique très clairement dans une conversation avec Morgenthau : « Nous sommes les maîtres absolus de ce pays. Je n'ai nullement l'intention de rejeter le blâme sur nos subalternes, et suis tout disposé à assumer la responsabilité de tout ce qui est arrivé. Le Cabinet lui-même a ordonné les déportations et je suis persuadé que nous en avons le droit, attendu que les Arméniens nous sont hostiles ; de plus, nous sommes les chefs ici et personne au-dessous de nous n'oserait prendre de telles mesures, sans notre assentiment. » C'est ce que confirment les déclarations officielles : « Les assertions d'après lesquelles ces mesures auraient été suggérées à la Sublime Porte par certaines Puissances étrangères sont absolument dénuées de fondement. »

L'opération s'effectue partout en plusieurs temps.

Après la liquidation des notables, de nouvelles mesures visent les hommes qui sont restés dans leurs foyers : la conscription est en effet étendue aux hommes de seize à soixante-dix ans — c'est donc alors la quasi-totalité des hommes arméniens qui se trouve aux mains de l'armée turque. Quelles que soient les conditions dans lesquelles ils ont été saisis, le sort qui leur est réservé est invariable : ils seront purement et simplement exécutés. C'est déjà ainsi qu'avaient disparu ces Arméniens de vingt à quarante-cinq ans, qui, après avoir été enrôlés en août 1914, avaient fait l'objet d'une mesure de transfert dans les compagnies du génie.

Restent donc les femmes, les enfants et les vieillards. Pour eux, le processus est simple et toujours identique : le crieur public annonce la date fixée pour leur déportation, mais le délai est souvent extrêmement court, parfois même inexistant, et en tout cas rarement respecté. Ensuite, les voici rassemblés en convois que les autorités dirigent, à pied la plupart du temps, vers le Sud de l'Empire, dans ces régions où, selon le gouvernement, ils ne seront plus « nuisibles ». En fait, il s'agit de lieux désertiques et malsains comme le désert de Syrie ou la région de Deir-es-Zor, où ceux qui auront pu survivre jusque-là à toutes les violences qui leur seront réservées tout le long de la route ne résisteront pas bien longtemps au manque de nourriture et d'eau.

C'est ce qu'explique l'ambassadeur allemand dès le mois de juin : « Les déportés sont obligés de quitter leur domicile sur-le-champ ou dans un délai de quelques jours, si bien qu'il doivent abandonner leur maison et la plus grande partie de leur mobilier et qu'ils ne peuvent même pas se munir d'un minimum de vivres pour le voyage. Lorsqu'ils parviennent au lieu de destination, ils se trouvent sans aide et sans défense face à une population hostile. »
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Message par Sphinx Lun 8 Mar - 23:16

Le gouvernement turc reconnaît ces faits. Dans une « Publication aux Vilayets », Djemal énumère officiellement « quelques détails » : « Un certain nombre de leurs chevaux et de leurs effets de valeur ont été volés. Sous prétexte qu'ils seront rationnés en route, ils ont été laissés sans pain et sans eau. Ils ont subi de la part des fonctionnaires chargés de les accompagner un traitement sévère et inutile tel que d'insultes et des voies de faits. Pendant leurs étapes, ils ont dû se suffire des 25-30 drames de pain (100 g) et une solde de 25 paras (soit 0,006 livre turque) par jour. Les employés et professeurs des écoles et orphelinats arméniens ont subi le même traitement que la population indigène au lieu d'être renvoyés dans leurs provinces. On ne laissa même pas à certains d'entre eux le temps de prendre leurs effets. A Gueben des femmes ont été convoquées au moment où elles faisaient leurs lessives et durent se mettre en route pieds nus et sans avoir pu emporter les linges qu'elles avaient lavés. Certains pères de familles ont été expédiés à des endroits séparément de leurs femmes et enfants. Et par manque de moyens de transport, certaines femmes ont dû se débarrasser de leurs enfants comme d'une charge inutile et les ont laissés au bord d'une route ou au revers d'une haie et même certaines d'entre elles essayèrent de les vendre. La permission de faire venir leurs bêtes qui se trouvaient à quelque distance de leurs lieux d'habitation leur a été refusée. »

Les uns et les autres reconnaissent même que « des faits regrettables » se sont produits. « Dans certains endroits, des excès ont été commis durant le voyage. Il est probable que les Arméniens expulsés de Diarbekir vers Mossoul se sont fait tous égorger en chemin. Il est tout à fait exclu que le gouvernement fournisse aux déportés de l'argent, de la nourriture ou une aide quelconque16», dit l'ambassadeur allemand. Et le gouvernement turc de renchérir : « Pendant l'application de cette mesure, les Arméniens furent parfois victimes de regrettables abus et violences. »

La comparaison du nombre de personnes qui composent les convois de déportés au départ et à l'arrivée est tout à fait instructive à ce sujet. Un exemple suffit : « Sur 696 personnes qui ont quitté Adiaman, 321 sont arrivées à Alep, 206 hommes et 57 femmes ont été tués, 70 femmes et jeunes filles et 19 jeunes garçons ont été enlevés. Il n'y a pas d'information sur les autres. »

Un autre illustrera mieux que tous les discours ce que furent les conditions réelles de la déportation. On comprendra en le lisant pourquoi l'ambassade allemande peut affirmer dans son mémorandum du 4 août, à propos des déportés, que « la plupart d'entre eux ont péri avant même d'arriver au lieu de leur destination16 ». Et s'il n'y a ici ni noms de lieux, ni noms de personnes, c'est parce que le témoignage est donné à un moment où le massacre continue et où d'autres êtres humains risquent encore de subir le même sort : nous n'en sommes qu'au début...

« Le 1er juin, 3 000 personnes (pour la plupart des femmes, des jeunes filles et des enfants) quittèrent H., accompagnées de 70 agents de police et d'un Turc influent, un certain K. Bey. Le jour suivant, ils arrivèrent sains et saufs à AL. Là, K. Bey se fit remettre par eux 400 livres, « afin de les garder en sûreté jusqu'à leur arrivée à Malatia » et promit de les accompagner jusqu'à Ourfa pour les protéger ; mais le jour même il s'enfuit emportant l'argent.

« Le troisième jour, le convoi des exilés arriva à AM. où les Arabes et les Kurdes commencèrent les enlèvements des femmes et des jeunes filles, qui se continuèrent jusqu'à leur arrivée à la première station de chemin de fer à Ras-ul-Aïn, sur la ligne de Bagdad. Les gendarmes qui leur avaient été donnés pour leur protection incitèrent les tribus à demi-sauvages des montagnes à les attaquer pour les voler, les tuer ou violer leurs femmes et les enlever ; et maintes fois eux-mêmes violèrent les femmes sans s'en cacher.


« Le quatrième jour, ils arrivèrent à A.N., où les gendarmes tuèrent trois des hommes les plus notables*. Le neuvième jour, ils arrivèrent à AO., où les chevaux, qui avaient cependant été loués, payés pour tout le voyage jusqu'à Malatia leur furent repris et renvoyés, de sorte qu'ils eurent à louer d'autres chars à bœufs pour être conduits à Malatia. A partir de là beaucoup d'entre eux furent laissés sans bêtes de somme — quelques-uns seulement se trouvant à même d'acheter des ânes et des mulets, qui par la suite leur furent également volés.

« A AO., un gendarme enleva Madame L. ainsi que ses deux filles et s'enfuit avec elles.

« Le treizième jour, la caravane arriva à Malatia, mais elle n'y resta qu'une heure seulement, car ils retournèrent au village de AP., distant de dix heures de marche de Malatia. A cet endroit, les gendarmes abandonnèrent complètement les déportés après leur avoir pris environ 200 livres, en paiement de la « protection » qu'ils leur avaient accordée jusque-là, et les déportés furent laissés à la merci du brutal Bey (chef de clan) des Kurdes de Aghdjé-Daghi.

« Le quinzième jour, ils montaient péniblement la pente raide de la montagne, lorsque les Kurdes entourèrent 150 des hommes de tous âges, de quinze à quatre-vingt-dix ans, les emmenèrent à quelque distance et les assassinèrent ; ils revinrent ensuite et se mirent à voler les déportés.

« Ce jour-là, un autre convoi de déportés (dont 300 hommes seulement) venant de Sivas, d'Eghin et de Tokat, rejoignit le convoi de H., formant ainsi un convoi plus important d'un total de 18 000 personnes. Ils repartirent le dix-septième jour sous la soi-disant protection d'un autre bey kurde.

« Ce bey fit appeler ses hommes, qui attaquèrent le convoi et le pillèrent. Ils emmenèrent avec eux cinq des plus jolies jeunes filles et quelques Sœurs de Grâce de Sivas. A la nuit quelques jeunes filles encore furent enlevées, mais elles furent ramenées après avoir été violées. On se mit en route de nouveau et au cours du voyage les jolies jeunes filles étaient enlevées une à une, tandis que les retardataires du convoi étaient invariablement tués.

« Le vingt-cinquième jour, ils arrivèrent au village de Gueulik, dont tous les villageois suivirent le convoi sur une longue distance, tourmentant et volant les déportés. Le trente-deuxième jour, ils arrivèrent au village de Kiahda, où ils restèrent deux jours et où de nombreuses jeunes filles et femmes furent encore enlevées.
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Message par Sphinx Lun 8 Mar - 23:21

« Le quarantième jour, le convoi arriva en vue du fleuve Mourad, qui est une branche de l'Euphrate. Ils virent là les corps de plus de 200 hommes emportés par le fleuve avec des traces de sang, ainsi que des fez, des vêtements et des bas tachés de sang, abandonnés sur les rives.

« Le chef du village voisin leva un impôt d'une livre par personne, comme rançon pour ne pas être jeté dans le fleuve.

« Le cinquante-deuxième jour, ils arrivèrent à un autre village, où les Kurdes les dépouillèrent de tout ce qu'ils avaient, même de leurs chemises et caleçons, de sorte que pendant cinq jours tous les exilés continuèrent leur marche complètement nus sous un soleil ardent. Les cinq jours suivants on ne leur donna pas un morceau de pain, ni même une goutte d'eau. Ils furent épuisés de soif à en mourir. Des centaines et des centaines tombèrent morts en chemin, leurs langues étaient changées en charbon, et lorsqu'au bout de cinq jours ils arrivèrent près d'une fontaine, tout le convoi se rua naturellement vers elle ; mais les gendarmes leur barrèrent le chemin et leur interdirent de prendre une seule goutte d'eau. Ils voulaient la vendre au prix d'une à trois livres le verre, et parfois même, après avoir touché l'argent, ils les empêchaient de prendre l'eau. A un autre endroit où se trouvaient des puits, quelques femmes s'y jetèrent, n'ayant ni corde ni seau pour y puiser de l'eau. Ces femmes furent noyées mais cela n'empêcha pas le reste des exilés de boire à ces puits malgré les cadavres puants qui s'y trouvaient. Parfois, lorsque les puits étaient peu profonds et que les femmes y pouvaient descendre et en remonter, les autres exilés se ruaient sur elles pour lécher et sucer leurs vêtements sales, mouillés, pour apaiser leur soif.

« Lorsqu'ils venaient à traverser un village arabe dans leur état de nudité, les Arabes les prenaient en pitié et leur donnaient des morceaux de vêtements pour se couvrir. Quelques-uns parmi les déportés auxquels il restait encore quelque argent achetèrent des vêtements ; mais d'autres restèrent nus ainsi tout le long du chemin jusqu'à la ville d'Alep. Les pauvres femmes pouvaient à peine marcher tant elles étaient honteuses ; ils avançaient tous courbés en deux.

« Même dans leur état de nudité, ils avaient trouvé quelques moyens de conserver le peu d'argent qu'ils avaient, quelques-uns le conservaient dans leurs cheveux, d'autres dans leur bouche ou dans leur sein ; et lorsqu'ils étaient attaqués par des voleurs, il s'en trouvait d'assez adroits pour chercher l'argent dans les parties les plus secrètes, et cela nécessairement avec bestialité.

« Le soixantième jour, lorsqu'ils arrivèrent à Viran-Chéhir, il ne restait plus que 300 exilés sur les 18 000. Le soixante-quatrième jour, ils rassemblèrent tous les hommes, les femmes malades et les enfants, et ils les brûlèrent et les tuèrent tous. On ordonna à ceux qui restaient de continuer leur chemin. Après un jour de marche, ils arrivèrent à Ras-ul-Aïn où pendant deux jours, pour la première fois depuis leur départ, le gouvernement leur donna du pain. Le pain était immangeable ; et cependant on ne leur donna même pas cela les trois jours suivants.

« Un Circassien persuada alors la femme d'un pasteur de Sivas et d'autres femmes avec leurs enfants d'aller avec lui à la station, leur promettant de les envoyer à Alep par chemin de fer. Malgré tous les avertissements de leurs amis, ces femmes suivirent l'homme, car ni elles ni leurs enfants n'étaient plus en état de terminer le voyage à pied. L'homme les emmena dans la direction opposée à la station, leur expliquant qu'il emprunterait de l'argent à un de ses amis tout près, pour payer les billets ; mais peu après il revint à l'endroit où le convoi s'était arrêté, mais sans les femmes et les enfants.

« Le Gouverneur de l'endroit demanda trois livres pour lui-même et une livre pour le billet de chemin de fer à chacun d'eux, avant de les laisser prendre le train.

« Lorsqu'au soixante-dixième jour, ils arrivèrent à Alep il ne restait que 35 femmes et enfants sur les 3 000 exilés partis de H., et 150 femmes et enfants en tout du convoi de 18 000 personnes. »

On peut ici apprécier à sa juste valeur le distinguo auquel les autorités turques auront recours peu après à propos de massacres et de déportations identiques, mais mis en œuvre cette fois contre la population arabe de Syrie, également soupçonnée de menées insurrectionnelles. Ayant procédé à la déportation en Anatolie des familles des suspects, le commandement de la IVe armée déclare « pour écarter les commentaires tendancieux que les gens mal avisés et mal intentionnés ont essayé de faire prévaloir » :

« Le Gouvernement n'a pas déporté mais simplement transporté ces familles. »

lire la suite sur:http://www.imprescriptible.fr/carzou/p3c1e


Source:http://www.imprescriptible.fr/carzou/p3c1a

Colère de la Turquie après la reconnaissance du génocide arménien par le Parlement suédois

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Dernière édition par Toufik le Dim 14 Mar - 17:56, édité 1 fois
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Personne à contacter Re: Les génocides dans l'histoire

Message par Sphinx Lun 8 Mar - 23:38

Sabra et Chatila, la mémoire à vif

Du 16 au 18 septembre 1982, l’horreur s’est abattue dans les camps palestiniens de Sabra et Chatila à Beyrouth. Durant plus de 40 heures, des centaines de Palestiniens ont été décimés par des miliciens phalangistes libanais armés et protégés par les forces d’occupation israéliennes . Un massacre planifié, orchestré et mis en œuvre par l’état major de l’armée israélienne qui bouleversa le monde entier.

Le peu d’empressement dont font montre les instances internationales et en premier lieu l’Organisation des Nations Unies pour mettre un terme à l’impunité dont bénéficient les responsables des massacres nourrit chez les palestiniens un profond sentiment d’injustice. En effet, aucune enquête internationale n’aura été mise en œuvre pour déterminer les responsabilités des massacres, il en résulte qu’aucune accusation n’a pu être prononcée. C’est d’une véritable démission de la communauté internationale dont il est question. L’enquête établie par le juge israélien Kahan (et dont les conclusions ont été publiées en 1983) avait abouti à la mise en cause personnelle de l’actuel Premier ministre israélien Ariel Sharon, alors ministre de la défense et à sa responsabilité indirecte dans les tueries . En conséquence, Ariel Sharon a été contraint à la démission mais en réalité, il n’a jamais cessé d’exercer des responsabilités politiques au sein du gouvernement israélien.

A l’impunité dont bénéficient les responsables israéliens, il faut ajouter l’impéritie de la justice internationale, comme le démontre l’insuccès de la procédure judiciaire engagée contre Ariel Sharon en Belgique et dont les débats auront été marqués par une grande confusion.

Ce sentiment d’injustice est d’autant plus aigu que les Palestiniens bénéficient au Liban d’un statut de citoyens de « seconde zone ». Le déni de justice s’accompagne ainsi d’un véritable ostracisme dont souffrent les réfugiés palestiniens au Liban.

Les 12480 survivants de Sabra et Chatila ainsi que leurs descendants ne bénéficient d’aucune nationalité , ni palestinienne ni libanaise. Le même triste sort d’apatrides est réservé aux quelques 380000 Palestiniens établis au Liban. Les instance internationales auront failli à leurs responsabilités rappelées dans une résolution votée en décembre 1948, laquelle reconnaît le droit inaliénable du peuple palestinien à disposer de sa terre en affirmant « qu’il y a lieu de permettre aux réfugiés qui le désirent de rentrer dans leurs foyers le plus tôt possible et de vivre avec leurs voisins ».

En 2001, le déficit budgétaire de l’agence de l’ONU en charge des réfugiés, l’UNRWA s’élevait à 65 millions de dollars, soit 21% du budget total, du fait du refus des Etats membres d’honorer leurs contributions financières. De fait, la situation économique des réfugiés palestiniens n’a cessé de se détériorer de façon dramatique, les secteurs de la santé et de l’éducation étant particulièrement sinistrés.

Entre rêve de retour et exigences de dignité, les Palestiniens subissent, selon l’expression de l’écrivain libanais Elias Khoury, une"situation suspendue".

Le 11 Octobre dernier, nous sommes allés à la rencontre des réfugiés palestiniens de Sabra et Chatila afin de recueillir leurs témoignages, alors que le monde célèbre le 20e anniversaire des massacres.

A Beyrouth, les quartiers de Sabra et Chatila concentrent une vaste zone d’habitations insalubre située à Beyrouth Ouest, entre l’aéroport international et le centre de la capitale.

Ce vendredi 12 octobre est jour de marché. Des étals disposés dans les rues sont couverts de tout un bric à brac d’objets hétéroclites, vieux postes de télévisions , cassettes, appareils électroménagers... Une foule bigarrée et nombreuse se presse au milieu de maisons dont l’état de délabrement avancé témoigne de la paupérisation et de la mal-vie qui prévaut ici. A Sabra et Chatila vivent des réfugiés palestiniens, mais aussi des immigrés venus d’Asie ou d’Ethiopie et des Libanais déshérités. La pauvreté est le lot de tous. Nous marchons dans des rues étroites jonchées de détritus, les canalisations sont apparentes et des fils électriques courent à même le sol.

Mon guide libanais me conduit vers la maison d’Ahmad Hussein, seul rescapé d’une famille de huit enfants.
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Personne à contacter Re: Les génocides dans l'histoire

Message par Sphinx Lun 8 Mar - 23:40

Ahmad HUSSEIN

« Le mercredi 15 septembre, on a appris que Béchir (Gémayel) avait été assassiné. On se doutait que Sharon allait prendre cet assassinat pour prétexte afin de s’attaquer aux camps, et c’est exactement ce qui s’est passé. Les Israéliens prétendaient pourchasser des militants mais il n’y avait aucun combattant dans les camps, et ils le savaient bien sûr, puisqu’ils étaient tous partis conformément aux accords et au cessez-le feu conclus par les Israéliens, l’OLP et les Américains. Sharon avait prémédité les massacres. La preuve, c’est que le mercredi les avions israéliens ont effectué des vols de reconnaissance, des raids fictifs au dessus des camps. Dans la nuit de mercredi à jeudi, ils ont cerné les camps, pour préparer l’assaut final des kataëbs (phalangistes alliés à Israël NDLR). Les miliciens ont fait leur entrée à Chatila par le Sud et le Sud Ouest le lendemain vers midi. Ils sont rentrés dans des jeeps de l’armée israélienne. Tous les hommes en armes étaient partis, nous étions pris au piège. Faits comme des rats. Les hommes du camp se sont rassemblés pour préparer la résistance. L’un d’entre eux connaissait l’existence d’une cache d’armes laissée par les hommes d’Arafat. On a alors organisé une distribution d’armes. Ce n’était que des armes de poing, pas vraiment de quoi opposer une résistance suffisante aux assaillants, mais au point où nous étions, tout était bon pour nous défendre. Mais le soir du jeudi et durant toute la nuit, les bombardements se sont intensifiés, une pluie de bombes nous tombait dessus, alors nous nous sommes découragés. Franchement, que pouvions nous faire face à leurs bombes à fragmentation, au napalm, au phosphore ? Nous avions compris que nos armes légères ne nous permettraient pas de défendre la vie de nos familles. Alors, dans la panique, le désespoir, nous avons décidé de dynamiter la cache d’armes pour donner à nos ennemis l’illusion que nous avions les moyens de leur résister. Le vacarme de l’explosion, ajouté au bruit des bombardements, c’était infernal, on aurait dit la fin du monde.

Les pères se sont réunis et ont décidé que la seule façon d’éviter le bain de sang, c’était de se rendre. Alors les plus vieux sont partis à bord d’un véhicule auquel ils avaient accroché un drapeau blanc en signe de paix. On ne les a jamais revus. Ils nous étaient Impossible de fuir. Les soldats israéliens qui cernaient le camp avaient pour ordre de tirer à vue sur toute personne qui tenterait de fuir les camps.

Dans la nuit, on y voyait comme en plein jour grâce aux fusées éclairantes que tiraient les soldats israéliens pour faciliter la tâche de leurs alliés phalangistes. Des Israéliens criaient dans un haut parleur "rendez-vous et votre vie sera épargnée". Alors je suis sorti de mon abri pour implorer la vie des miens, d’autres personnes sont sorties aussi tenant un linge blanc à la main. Et j’ai vu de mes propres yeux ces hommes tomber un à un, abattus par des francs tireurs. J’ai réussi à fuir mais je me suis retrouvé un peu plus loin face à une patrouille. C’était des hommes des FL (les Forces libanaises NDLR) et des soldats israéliens. Ils m’ont conduit avec d’autres personnes à la Cité sportive. Les gens étaient hagards, hébétés, beaucoup pleuraient. Certains récitaient tout haut des versets du Coran. J’ai vu un homme embrasser sa femme et ses enfants pour leur dire adieu. Au petit matin, ils ont séparé les hommes des femmes et des enfants. Ils ont conduit les gens par groupe et ont commencé à les fusiller les uns après les autres, en commençant par les hommes, parfois ils les achevaient à coups de hache. J’ai moi même été blessé, je me suis effondré, j’ai été inondé par le sang d’un autre homme tué net, tombé sur moi. Je m’attendais d’une seconde à l’autre à recevoir un coup de hache mais rien ne s’est passé, alors je suis resté immobile faisant le mort. Peut-être que le sang d’un autre dont j’étais couvert devait laisser croire que je l’étais bien. Je suis resté comme ça des heures. Puis des gens du Secours m’ont ramassé et conduit à l’hôpital de Gaza. Là bas, c’était l’apocalypse. J’entendais des cris, des hurlements, les couloirs étaient jonchés de cadavres, noirs, certains étaient brûlés. Des miliciens étaient venus achever les malades. Un médecin m’a raconté en pleurant que des centaines de personnes avaient réussi à fuir mais elles avaient dû rebrousser chemin sous la menace des soldats israéliens qui avaient dirigé leur canon vers eux. Alors ils avaient dû retourner à l’hôpital où les tueurs les attendaient pour les fusiller et les achever à la hache et au couteau. Je n’avais qu’une obsession, retrouver ma mère, mes frères et sœurs et les conduire à l’abri, à Beyrouth-Ouest. Lorsque je suis arrivé chez moi, il n’y avait personne. Un voisin m’a dit que ma mère et les petits avaient été conduits à Orsal. Tout au long du chemin, j’ai buté sur des cadavres. J’ai reconnu des voisins, des amis. Il y avait des jeunes femmes dont les corps étaient dénudés, pieds et poings liés, des cadavres étaient disposés en croix, d’autres dans des postures obscènes. Il y en avait qui n’avaient plus de tête. C’était l’horreur absolue. La vue du sang, l’odeur de chair brûlée, l’épouvante. Mes jambes ne me portaient plus, j’ai fini par marcher à quatre pattes, me frayant un passage entre les cadavres. S’il n’y avait pas tout ce sang, j’aurais cru ma mère endormie. Deux de mes petites sœurs n’avaient plus de visage, je les ai reconnues à leurs vêtements. Qu’Allah me pardonne, je voulais mourir… »

Ahmad voudrait continuer à parler mais il ne peut plus. D’un geste, il nous indique que notre entrevue est terminée. Lorsque nous le quittons, Ahmad reste assis, figé, il pleure doucement.
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Personne à contacter Re: Les génocides dans l'histoire

Message par Sphinx Lun 8 Mar - 23:51

Zahiyé DONO a perdu un enfant et dix personnes de sa famille proche (cousins, oncles, tantes et neveux).

« Mon fils était un gentil garçon. Il n’était pas politisé et n’avait jamais servi dans une aucune armée, aucune milice. Il en aurait été incapable. Je n’étais pas à Chatila quand ça c’est passé. J’étais sortie pour quelques jours. Vous laissez un enfant, des proches et vous retrouvez des cadavres. Quand je suis rentrée, je ne pouvais pas y croire. J’avais laissé un enfant plein de vie, on m’a rendu un cadavre. Des morts, il y en avait partout dans les rues. Des fosses béantes remplis de cadavres empilés les uns sur les autres. Beaucoup de gens étaient restés cloîtrés chez eux et on trouvé un spectacle d’horreur en sortant. Comme mes enfants qui sont restés terrés dans notre maison, terrorisés, ils entendaient les bombes, les cris, les coups de feu et s’attendaient à chaque instant à voir entrer des miliciens venir les fusiller ou les emmener pour les violer et les tuer comme c’est arrivé pour des voisins. En partant, nos combattants avaient reçu l’assurance que nous serions protégés. (3) Sinon, ils ne seraient jamais partis.

Ma vie n’est pas ici et ne l’a jamais été. Chaque jour, je caresse l’espoir de rentrer chez moi en Palestine. Cet espoir, c’est tout ce qui me retient à la vie. Si je perds cet espoir, il vaudrait mieux que je meure tout de suite. »

Mahmud SCHEHADE, 32 ans marié et père de deux enfants (Léna et Fadi).

« La vie ici est très difficile. Etant libanais, je pourrais m’installer ailleurs. Mais depuis que je me suis marié avec Fathia qui est palestinienne, mon sort est lié à celui des Palestiniens de ce camp. Ce qui est pénible à vivre, c’est le quotidien. Le problème de l’eau, les coupures d’électricité. Je suis comptable de formation mais j’ai beaucoup de mal à trouver du travail. Pourtant, je suis obligé de travailler car avec mon salaire, je ne fais pas seulement vivre ma femme et mes enfants mais aussi la famille de ma femme, sa mère, ses frères et sœurs. Alors je suis obligé d’accepter n’importe quel travail, même si les conditions de son exercice sont précaires et le salaire très faible. Je n’ai pas le choix.

Depuis que je vis avec les Palestiniens et que je partage leur quotidien, je me suis engagé en politique car je suis révolté par leurs conditions de vie. Je milite au sein du Parti communiste libanais. Le mouvement auquel j’appartiens s’appelle Jamaa Chaabiyé. On essaye avec de faibles moyens de venir en aide aux jeunes de notre quartier, les aider afin qu’ils trouvent un travail et un logement, pour qu’ils puissent avoir une vie digne. La surpopulation ici est un problème particulièrement préoccupant. Des milliers de personnes s’entassent dans des camps dont la superficie ne dépasse pas quelques hectares. Il n’y a pas d’assainissement, ce qui est la cause de graves problèmes d’hygiène qui mettent la santé des gens en péril.

Il y a un autre mouvement de gauche aussi qui s’appelle Ittihad Chaabat Democracy de Ghassan Ejazi. Les gens de cette organisation sont aussi très sensible à la mal-vie des Palestiniens. Malheureusement, nos moyens sont très limités car tout changement éventuel est tributaire de la bonne volonté de l’Etat libanais. »

Abu Mohamed

« On vit ici les uns sur les autres. Saviez vous que l’Etat libanais nous interdit de nous agrandir ? De nous rassembler au sein d’associations ? Il y a même une liste de plus de 70 professions qu’il nous est interdit d’exercer ! Nos maisons qui tombent en ruines, on a pas le droit de les acheter. Je ne vous ai pas dit le meilleur : à chaque fois que l’on sort des camps, on est surveillé par l’armée !

Je vous dis, ça c’est pas une vie !

J’ai l’impression qu’on gène ici, ça pue, c’est sale. Les Libanais ont un peu honte de nous avoir ici, on gâche d’une certaine façon l’image qu’ils voudraient donner de leur pays, celle d’une « Suisse du Moyen-Orient » ! Alors pour l’Etat libanais, il aurait sans doute mieux valu qu’aucun d’entre nous ne réchappe des massacres. La plupart d’entre nous sommes des survivants de Deir Yassin . Nous avons fui l’horreur sioniste, les massacres et la destruction de nos maisons pour venir ici. Nous avons échappé aux sionistes en 1948 et ils sont venus nous achever ici. On dit que Yaron aurait dit à ses subalternes qu’il ne mourrait pas en paix tant qu’il n’aurait pas accompli le « nettoyage » des camps.

(D’un geste vif, Abu Mohamed saisit au vol un insecte imaginaire qu’il garde serré dans son poing puis il fait mine de le relâcher) . Vous voyez ? C’est le sort que les sionistes nous réservent. Ils nous écrasent et nous laissent crever la gueule ouverte. Vous pouvez me dire quelle différence il y a entre Sharon, Barak ou Péres ? Pour moi, il n’y en pas, ils ont tous tué des Arabes, des Palestiniens , des civils désarmés et par centaines. Il y en a qui disent des uns qu’ils sont des « colombes », des autres des « faucons ». Moi des colombes ou des faucons je n’en ai vu que les canons. Et je peux vous dire qu’ils crachent tous la même mort.

Ici, on est dans un état intermédiaire entre la vie et la mort. L’Etat libanais nous fait comprendre chaque jour qu’il ne veut pas de nous. Ah bon, nous sommes indésirables ? Alors qu’ils nous laissent rentrer chez nous ! »
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Message par Sphinx Mar 9 Mar - 0:00

La résolution 521 du Conseil de Sécurité des Nations Unies du 19 septembre 1982 a condamné le massacre qui a été qualifié de « génocide » par l’Assemblée Générale de l’ONU (le 16 décembre 1982).

Le chiffre exact des victimes de Sabra et Chatila n’a jamais pu être déterminé avec précision, Les bilan varie selon les sources, de 700 (chiffre officiel israélien) à 3.500 ( selon l’enquête du journaliste israélien Amnon Kapeliouk . Le décompte est rendu d’autant plus difficile que l’on sait qu’un millier de personnes ont été enterrées dans des fosses communes par le CICR, d’autres par leurs proches ou des miliciens eux mêmes , sans oublier les victimes des bombardements enterrées sous les décombres de leurs habitations.

« Après plus de vingt années de souffrances, les survivants et les proches des victimes de ces massacres ont le droit de connaître la vérité, et de voir traduits en justice les responsables présumés de ces crimes qui relèvent du droit international » a déclaré Amnesty International dans un communiqué.

« Permettre à la justice belge de procéder à de telles investigations en tant qu’agent de la communauté internationale est le moins que le monde puisse faire pour les survivants et les proches des victimes de ces massacres, alors qu’ils commémorent ces atrocités pour la 20e année consécutive », affirme encore l’organisation de défense des droits humains.

Le 18 juin 2001, 23 survivants des massacres perpétrés en 1982 dans les camps de réfugiés de Sabra et Chatila ont en effet déposé une plainte contre Ariel Sharon, à l’époque ministre de la Défense et contre des membres de la milice libanaise chrétienne des Kataëb pour des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et des actes de génocide liés aux tueries perpétrés dans les camps.

En effet, avec l’adoption par le Parlement belge en 1999 de la loi sur la compétence universelle, la justice belge peut traiter de dossiers internationaux portant sur des crimes contre l’humanité. Le principe (reconnu lors du procès Eichman qui a constitué une jurisprudence en la matière) pose que certains crimes sont si terribles et infâmes qu’ils intéressent l’humanité entière et ne sauraient par voie de conséquence faire l’objet d’une prescription ou dépendre d’une seule juridiction territoriale.

« Des Khmers rouges à Pinochet, en passant par Sharon, pour moi, la justice doit être égale pour tous et ce genre de crimes ne doit pas rester impuni » a affirmé Maître Mallat, l’un des défenseurs des plaignants. A ce jour, les survivants de Sabra et Chatila n’ont toujours pas obtenu justice. Pourtant, les témoignages tous concordants et l’enquête menée par Kahan et ordonnée par le Parlement israélien attestent de la responsabilité première de Sharon et de ses lieutenants.

« Nettoyer » les camps palestiniens, c’était l’ordre donné par Sharon à Gemayel lors de leur rencontre à Bikfaya le 12 septembre , tous les détails de l’opération ayant été négociés à ce moment là . Ariel Sharon avait en outre fait part de son intention d’envoyer les forces phalangistes dans les camps palestiniens de Sabra et Chatila le 9 juillet 1982 et il confirme ce fait dans sa biographie .

Le 16 septembre dernier, les survivants du génocide de Sabra et Chatila ont commémoré dans la dignité et le recueillement l’anniversaire d’un cauchemar qui n’en finit plus de les torturer. Une tuerie collective dont chaque détail sanglant a marqué au fer rouge la mémoire palestinienne. Le soir venu, des hommes, des femmes et des enfants ont brandi, au seuil de leurs habitations de fortune des bougies, symbole d’un espoir jamais éteint de justice.

Source:http://oumma.com
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Message par Syfou Jeu 11 Mar - 13:06

Massacre de My Lai ( Le 16 mars 1968 )

"ELLE courait vers les arbres... Elle transportait quelque chose.. J’ai tiré. Lorsque j’ai retourné son cadavre j’ai vu qu’elle avait un bébé dans ses bras. Mes balles l’avaient transpercé. Tout a vacillé dans ma tête. Puis le programme d’entraînement m’est revenu à l’esprit. Alors je n’ai plus rien fait d’autre que tuer. Je leur ai coupé la gorge, les mains, les oreilles. Je les ai scalpés."

Ce récit est celui d’un soldat américain qui a participé au massacre de My Lai.

Le 16 mars 1968, vers huit heures du matin, la compagnie Charlie, appartenant à la 11e brigade de la division américaine Americal, entrait dans le village vietnamien de My Lai, dans la Province de Quang Ngai, dans le sud du Viet Nam.

Leur chef, le lieutenant William Calley, leur dit :

"C’est ce que vous avez attendu, une mission, chercher et détruire."

Au moins 504 civils ont été assassinés en quelques heures : 50 victimes étaient âgées de 0 à 3 ans, 69 victimes étaient âgées de 4 à 7 ans, 91 victimes étaient âgées de 8 à 12 ans et 27 avaient plus de 70 ans. Ce crime américain contre l’humanité n’a pas eu son Nuremberg. L’armée américaine annonça une grande victoire et la mort de 128 ennemis.

Crime américain contre l’humanité

Le massacre ne fut stoppé que lorsque deux sous-officiers américains Hugh Thompson et Lawrence Colburn en hélicoptère remarquèrent le carnage et intervinrent ordonnant à ses équipiers de faire feu sur leurs compatriotes s’ils poursuivaient d’assassiner plus de civils.

En mars 1969, Ronald Ridenhour, un ancien GI, ayant appris ce qui s’était passé à My Lai, décida d’en informer les autorités américaines, mais les faits ne devinrent publics à partir du 17 novembre 1970 (début du procès), quand le journaliste américain Seymour Hersh publia les premiers témoignages sur ce crime.

Parmi les 26 officiers et soldats inculpés le 5 septembre 1969 pour ce massacre ou pour l’avoir couvert par la suite, seul le lieutenant, William Calley fut condamné le 29 mars 1971, malgré ses affirmations qu’il avait reçu des ordres de son capitaine Ernest Medina de tuer tous les habitants. Selon Calley, Medina lui donne l’ordre de nettoyer la zone de Mÿ Lai en n’épargnant personne. Motif invoqué : le hameau serait un repaire du Viêt-cong.

Medina niera avoir donné de tels ordres et sera acquitté dans un autre procès.

Donc seul le lieutenant Calley fut reconnu coupable de meurtres avec préméditations sur 80 civils qui avaient été réunis sur la place du village et 80 autres personnes qui avaient été réunies dans un fossé et condamné aux travaux forcés à perpétuité et radié de l’armée.

Le 1 avril 1971, 2 jours après sa condamnation, le président Nixon demanda sa libération de prison et son cantonnement au fort militaire de Bennings en attendant l’appel du jugement.

Le 20 août 1971 les autorités militaires réduisirent sa peine à 20 ans

Le 16 avril 1974 le Secrétaire d’état à la défense réduit sa peine à 10 ans.

Trois ans plus tard, le 9 novembre 1974, lors d’un appel que Calley fit auprès d’une cour fédérale pour non respect de ses droits, un juge ordonna sa libération immédiate. Malgré un appel suspensif de l’armée et après plusieurs procédures judiciaires,

le lieutenant Calley ne passa finalement que 3 ans et demi aux arréts.

Aujourd’hui, "monsieur" William Calley tient une bijouterie huppée.

L’opinion publique américaine, d’abord émue par les révélations sur le massacre, a, ensuite, majoritairement basculé dans le nationalisme et, "au nom du devoir", acquitté les assassins.


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Message par Syfou Jeu 11 Mar - 13:25

Massacre de Falloujah (Irak)

Au début du mois de novembre 2004, l’armée américaine a lancé l’opération Phantom Fury (Fureur Fantôme) sur la ville de Falloujah, afin de prendre contrôle de la ville et de capturer Abu Musab Al-Zarqawi. La bataille fait plusieurs milliers de morts irakiens dont un bon nombre de civils, de femmes et d’enfants, mais Al-Zarqawi reste introuvable.

L’armée a largué sur cette ville des armes incendiaires, vraisemblablement des bombes MK-77 qui sont les successeurs du napalm, et du phosphore blanc qui provoque des blessures épouvantables et une mort atroce. Mohammed Tareq Al-Deraji, directeur du Centre d’Etudes des Droits de l’Homme de Falloujah, est venu témoigner devant des députés européens et a apporté des photos de victimes montrant l’utilisation de telles armes de destruction massive. Deux soldats américains ayant participé à cette opération apportent leur témoignage et confirment l’utilisation de telles armes sur des populations civiles de façon non discriminée.

Les Conventions de l’ONU de 1983 ont banni le napalm et le phosphore, et leur utilisation est depuis considérée comme un crime de guerre. Mais le massacre de masse qui a eu lieu à Falloujah n’est pas la seule preuve de violation des droits et conventions internationaux par l’armée américaine, les profanations, violations et destructions de lieu saints et de monuments historiques de l’ancienne Babylone sont décrits par les soldats comme une pratique courante. Après 20 ans d’exercice de ses fonctions, l’ancienne parlementaire britannique Alice Mahon a démissionné et s’est battue pour faire éclater la vérité et arrêter le massacre, mais pour l’instant cela n’a pas eu beaucoup d’effet et en tout cas cela n’a pas empêché la réutilisation de telles armes chimiques sur les populations.


Falloujah Le Massacre Caché



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Falloujah Le Massacre Caché Part2
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Personne à contacter Re: Les génocides dans l'histoire

Message par Sphinx Lun 22 Mar - 22:07

Génocide des Tutsi au Rwanda

Un génocide populaire

Ce fut un génocide de masse. La participation de la population rwandaise au génocide a été d'une importance inimaginable, ce qui rend d'autant plus méritants les actes de résistances de Hutu. Paul Rusesabagina, dont le film Hotel Rwanda relate le témoignage, symbolise ces hutu qui refusèrent cet engrenage. Une grande partie des rescapés actuels le doivent à des protections hutu extrêmement courageuses. Mais certaines de ces protections furent ambiguës, car des hutu protégeaient quelques connaissances, et massacraient d'autres Tutsi. Cela leur sert d'alibi aujourd'hui devant les tribunaux. Ceux qui ont refusé de participer ont dû se cacher et ont souvent été massacrés comme traîtres.

Le génocide des Juifs, et des autres populations ciblées par le nazisme, est caractérisé par l'action de troupes spéciales qui agissent en secret. Dans le cas du Rwanda on a affaire à une notion très moderne : une campagne médiatique qui donne à toute une population le même objectif conscient, exterminer une minorité jusqu'au fœtus extrait du ventre de sa mère pour que la « race » s'éteigne. On ne peut cependant pas ignorer les dizaines de milliers de miliciens entraînés pour tuer par les éléments extrémistes des forces armées (gardes présidentielles, paracommandos, etc.). L'instrument de ce génocide n'est pas d'abord la machette, mais la radio des mille collines, créée dans ce but, et guidant globalement et en détail le travail des tueurs. Une autre différence non négligeable avec le génocide des Juifs, des Arméniens et des Tziganes, c'est la présence d'une armée triomphante issue de la minorité en cours d'extermination.


Le livre Une saison de machettes de Jean Hatzfeld évoque, par la bouche même des tueurs qu'il interviewe, le caractère de travail collectif organisé, les pressions exercées au quotidien sur les populations réticentes, ceux qui font semblant d'aller au travail, les horaires du travail, etc. « Il faut finir le travail » est un leitmotiv des génocidaires. Aucun Rwandais n'a pu échapper à la conscience de l'événement en aucun point du pays. Comme tout génocide, celui-ci fut conçu comme un service public devant épurer le peuple du germe d'une « sale race ».

L'emprise de cette campagne médiatique fut amplifiée par le fait que beaucoup de notables hutu ont participé activement à l'entraînement de la population dans cette aventure criminelle. Des prêtres, des pasteurs, des médecins, des instituteurs, des professeurs de faculté, des juges, des avocats, des officiers sont dans les prisons. Mais la majorité des tueurs, volontaires ou ayant agi sous la contrainte, échappe au jugement. Ils sont trop nombreux.

Les juridictions Gacaca, tribunaux traditionnels, populaires comme l'a été ce génocide, viennent de juger un million et demi de personnes. Il reste encore quelques milliers à juger par les juridictions de droit commun, puisque les juridictions Gacaca doivent fermer leurs portes à la fin du mois de juin 2009. Un million et demi de personnes, c'est énorme, c'est-à-dire une personne adulte sur trois au moment du génocide. Mais il ne faut pas perdre de vue que les complices des tueurs sont incalculables. Beaucoup de ceux qui ont dénoncé, participé aux traques, aux pillages, etc., ne seront sans doute jamais inquiétés. Il était bien vu de se présenter aux « barrières » avec sa machette.

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Personne à contacter Re: Les génocides dans l'histoire

Message par Sphinx Lun 22 Mar - 22:10

La complicité de la France

Le génocide des Tutsi du Rwanda a fait d’avril à juillet 1994 environ 1 million de victimes, massacrées sous le prétexte d’être tutsi ou pour s’être opposées aux massacres. Planifié par les extrémistes hutu du régime du président Habyarimana, ce génocide a pu être mis en œuvre grâce au silence de la communauté internationale et surtout à l’appui apporté par la France aux génocidaires.

Alors que les plus hautes autorités françaises savaient qu’un génocide pouvait survenir au Rwanda, elles n’ont rien fait pour l’enrayer. Au contraire, elles ont soutenu ceux qui le préparaient puis ont apporté un appui décisif, tant politique que militaire, à ceux qui le commettaient. Ce soutien constitue bien, en droit, une « complicité » de génocide.

C’est ce qu’entend rappeler ce livre, 15 ans après les faits. Autour de 15 questions-clés, il s’attache à démontrer les éléments constitutifs de cette complicité et tente de répondre aux interrogations qu’une telle accusation pose.

Pourquoi la France s’est-elle ainsi engagée au Rwanda ? Est-il possible de juger les responsables français ? Que penser des arguments de ceux qui réfutent la complicité de la France dans le génocide ? Depuis le génocide, quelle est l’attitude de la classe politique française ? Quelle est celle des militaires engagés au Rwanda ? Quelle connaissance l’opinion française a-t-elle de l’implication française ? Qu’est-ce qu’une Commission d’enquête parlementaire apporterait de plus que la Mission d’information de 1998 ?

Au travers des réponses à ces questions, ce livre entend aider les citoyens français à comprendre en quoi cette tragédie « africaine » fait à jamais partie de l’histoire de notre pays et met directement en cause le fonctionnement de nos propres institutions.

http://survie.org
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Personne à contacter Re: Les génocides dans l'histoire

Message par Syfou Ven 21 Mai - 16:05

Génocide en Ukraine 1932-1933

Communication de monsieur le Professeur Roman Serbyn, Université de Laval-Québec (Canada), lors du "Premier forum international Justice et prévention des génocides" à Villeurbanne le 23 octobre 2004

I - Témoignage - exposé du crime

Les Ukrainiens l'appellent "Holodomor" ou "l'extermination par la faim". Le fléau qui s'abattit sur l'Ukraine soviétique au début des années 1930 et qui atteignit son paroxysme en hiver 1933 est aussi désigné sous le vocable de "famine artificielle" car le manque de vivres résultait non pas d'un désastre naturel, telle une sécheresse ou une invasion de sauterelles, mais provenait de la confiscation par l'État soviétique des denrées aliementaires indispensables à la population locale. Enlevés aux producteurs, les céréales et les autres produits agricoles furent emmagasinés sous bonne garde en Ukraine, puis transportés en Russie, ou vendus en Europe. Différentes estimations évaluent le nombre de victimes entre quatre et dix millions de personnes. Le chiffre de 6,000,000 fourni par un haut fonctionnaire de Kharkiv au rédacteur d'un journal yiddish de New York, reste encore le plus fiable. Par sa nature et son ampleur, la Grande Famine ukrainienne appartient à la catégorie de crimes que, suite aux atrocités de la Seconde Guerre Mondiale, la communauté internationale qualifia de "génocide" et condamna comme l'ultime crime contre l'humanité.

L'analyse de la famine ukrainienne ne saurait ignorer les spécificités des liens coloniaux qui rattachaient l'Ukraine à la Russie. Moscou refusait toujours de reconnaître les Ukrainiens comme un peuple distinct, avec droit à une vie nationale indépendante. Devenus maîtres du Kremlin, les bolcheviks s'opposaient à la désintégration de ce que Lénine appela jadis la "prison des peuples", et combattirent surtout la séparation de l'Ukraine - un pays de grande richesses naturelles et pourvu d’une abondante main-d'œuvre. Proclamée indépendante en 1918, l'Ukraine fut envahie par l'Armée rouge et ramenée dans le giron russe. L'ancien "grenier" de la Russie tsariste, devenu une république fantoche, continuait à ravitailler les centres urbains soviétiques. Quand Staline déclencha sa révolution industrielle vers la fin des années 1920, l'Ukraine devint une source indispensable de son financement. Le moindre signe d'un réveil national ukrainien fut interprété comme un rejet du pouvoir bolchevik et une menace à l'intégrité de l'empire soviétique, et fut réprimé en conséquence. La famine des années 1930 n'était que l'expression la plus sinistre de la politique coloniale russe en Ukraine.

Pendant les trente premières années du régime soviétique, les Ukrainiens connurent cinq famines (1921-23, 1924-26, 1927-28, 1932-33, 1946-47). Tous ces désastres auraient pu être évités si l'Ukraine avait utilisé ces produits agricoles pour subvenir d'abord aux besoins de sa propre population. La famine de 1932-33 - la plus meurtrière -correspond quant à elle à la définition de génocide, telle que formulée par la "Convention sur la prévention des génocides" de 1948. C'était un "acte commis dans l'intention de détruire une partie d'un groupe national". La cible de la politique génocidaire de Staline était la paysannerie ukrainienne - la force vitale et la base démographique de la nation ukrainienne. La "dékoulakisation" déracina la partie la plus compétente et performante de cette population et mena à la déportation d’un grand nombre en Russie. La collectivisation de l'agriculture permit à l'État de pousser les prélèvements jusqu'aux limites du possible. L'Ukraine fut soumise "à des conditions d'existence devant entraîner la destruction physique" d'un grand nombre de paysans. Pour empêcher la population de fuir les villages affamés, l'État introduisit un système de passeport, dont furent exclus les paysans.

Après des décennies de négation en URSS et en Occident, l'authenticité de la famine ukrainienne est enfin reconnue. Cependant, l'hésitation existe encore, à savoir si cette catastrophe doit être classifiée comme génocide ukrainien. On évoque souvent l'argument que la famine sévissait aussi en Russie et au Kazakhstan, et que les victimes en furent surtout les paysans. La question se pose alors: sommes-nous en face d’un problème à caractère socio-économique plutôt que national? Ces objections méritent une considération sérieuse. L'extermination des Kazakhs par la faim doit sans doute être inclue sur la liste des génocides, mais cette inclusion ne contredit d'aucune façon le génocide ukrainien. L'examen de la famine en Russie révèle que malgré les difficultés sérieuses de ravitaillement, il n'y avait pas de famine généralisée comme en Ukraine. Les régions affligées étaient contiguës à l'Ukraine et habitées en grande partie par les Ukrainiens (par exemple, le Kouban) et par d'autres minorités non-russes (dont des Allemands). Aussi, une comparaison de la proportion des paysans russes et ukrainiens morts d'inanition montre un écart énorme entre les deux groupes. Les tentatives de fuite des paysans ukrainiens vers la Russie et la Belarus est bien documentée, mais aucun mouvement dans le sens inverse n'a été enregistré. D'ailleurs, c'est pour empêcher les paysans ukrainiens de quitter leur pays que Molotov et Staline signèrent un circulaire secret en janvier 1933 visant à appréhender les fuyards sur la frontière ukrainienne.

Pour apprécier l'envergure du génocide ukrainien, il faut placer la famine dans le contexte de la politique de russification entreprit par le régime à la fin des années 1920 et au début des années 1930. L'ukrainisation des villes, effectuée par l'afflux des paysans ukrainiens, fut arrêtée et renversée par la russification de l'école et de l'administration. Une chasse aux élites intellectuelles ukrainiennes décima les cadres culturels et politiques de la république. La nation fut littéralement décapitée.
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Message par Syfou Ven 21 Mai - 16:09

II - Responsabilités directes et indirectes:

L'ultime responsabilité pour la famine incombe à Staline. Pour financer sa révolution industrielle, il décida d'exporter les céréales. Staline força la collectivisation à outrance de l'agriculture, sachant que les récoltes rassemblées dans les entrepôts communs seraient plus faciles d'accès par les autorités qu'éparpillées dans les fermes individuelles. L'État pouvait ainsi prélever la quantité de "blé commercial" voulue, sans tenir compte des besoins de la paysannerie. Pour faire face à toute opposition, Staline ordonna la décapitation du leadership paysan par la "dékoulakisation" ou la déportation des paysans riches, après la confiscation de leur propriété. Staline savait que l'opposition des paysans et la désorganisation de l'agriculture ferait baisser la production, mais malgré cela il ordonna la hausse des quotas dans les prélèvements. L'opposition à la collectivisation était la plus forte en Ukraine, et la hausse de quotas également. Staline savait que sa politique menait inévitablement à la famine. Quand la famine commença, il était renseigné sur la situation en Ukraine par les membres du Comité Central du Parti d'Ukraine (Vlas Tchoubar et Hryhorii Petvrovsky) et le chef de la région de Kharkiv (Terekhanov); l'écrivain Maxime Gorki fit de même pour le Caucase du Nord. Staline ne pouvait ignorer l'interpellation concernant la famine en Ukraine posé à la Ligue des Nations par Mowinkle, ni les requêtes auprès des autorités soviétiques du Comité International de la Croix-Rouge et du Cardinal Innitzer de Vienne. Staline refusa d'admettre l'existence de la famine et rejeta tout offre d'aide comme une calomnie contre son régime.

Le dictateur s'entoura d'acolytes qui étaient prêts à exécuter sa volonté. La discipline du parti et la structure pyramidale du pouvoir assurèrent la transmission des ordres jusqu'aux villages les plus reculés. Ainsi, pour accomplir son crime monstrueux Staline trouva de nombreux complices volontaires et involontaires, conscient ou inconscients de la gravité de leurs actes. Les paysans étaient dépeints par les journaux comme des égoïstes qui voulaient affamer la ville et renverser le régime ouvrier. Pas de surprise donc que le régime trouvait des ouvriers prêts à écraser ces "ennemis du peuple". Les ouvriers agricoles et les paysans pauvres étaient encouragés à dénoncer les koulaks qui les avaient exploités auparavant. Il y avait aussi des récompenses matérielles pour les collaborateurs du régime. La pression du système totalitaire et répressif sur ces exécuteurs ne justifie pas les actes criminels, mais en facilite la compréhension.

III - Situation post-criminelle:

La gravité de la famine en Ukraine dépasse largement le débat sur le nombre des personnes mortes. En réalité la famine avait décimé la population ukrainienne, affaiblissant physiquement et spirituellement les survivants. La déportation des centaines de milliers de fermiers ukrainiens privait la nation de ces meilleurs agriculteurs. Le village ukrainien traditionnel - la base de la nation et sa source principale de son renouveau- était à jamais détruit. Vidés par la famine, les villages ukrainiens étaient repeuplés de paysans russes, renforçant ainsi la russification du pays. En épargnant les citadins, la famine témoignait du fait que dans cet empire "sans classes", les paysans ukrainiens se trouvaient en bas de l'échelle sociale. Tandis que pendant les années 1920, l'afflux des paysans ukrainiens dans les villes ukrainiennes aidait à les dérussifier, dans les années 1930, les paysans ukrainiens s'y réfugiaient pour échapper à leur identité paysanne et ukrainienne, devenue néfaste. Pour les paysans qui avaient survécu au génocide, la famine était aussi un ethnocide, les poussant à abandonner leur ethnicité devenue trop encombrante. L'extermination concomitante d'une partie des intellectuels ukrainiens, accusés de nationalisme, et la mise aux abois des autres, enleva à la nation ukrainienne le leadership indispensable à la résistance au régime totalitaire.

Une conséquence directe de la famine, dont la population ukrainienne blâmait les autorités soviétiques, fut l'accueil amical accordé aux forces allemandes au début de la Guerre germano-soviétique. Les soldats ukrainiens, pour la plupart campagnards, se rendaient en masse aux envahisseurs. Les kolkhoziens ukrainiens s'attendaient à être libérés du régime meurtrier de Staline. C'est le comportement répressif des nouveaux maîtres nazis qui désillusionna rapidement les naïfs et les retourna contre les Allemands. Or, Staline ne pardonna pas "l'infidélité" temporaire des Ukrainiens et, aux dires de Khrouchtchev, le maître du Kremlin aurait bien voulu les déporter en Sibérie, s'ils n'avaient pas été si nombreux... En fait, en politicien pragmatique, Staline n'avait pas l'intention d'annihiler tous les Ukrainiens: la main-d'œuvre ukrainienne était trop précieuse. Il s'agissait plutôt d'une extermination assez monstrueuse pour terroriser les autres et les forcer à une soumission inconditionnelle. Après la guerre, le régime soviétique évoquait constamment les atrocités nazies pour faire oublier la famine-génocide. Cette pratique est maintenue par les communistes qui continuent de nier la tragédie, même après la chute de leur régime et l'établissement d'une Ukraine indépendante.
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Message par Syfou Ven 21 Mai - 16:11

IV - Attentes et revendications des victimes et de leurs descendants:

Soixante-dix ans après l'évènement, le nombre de survivants de la famine s'amoindrit rapidement et leur capacité de revendiquer des dédommagements diminue. Il incombe à leurs descendants et à la communauté ukrainienne en général d'assurer qu'une justice, même partielle, soit rendue. On peut résumer en trois points les attentes des gens concernés par cette question: a) le rétablissement de la mémoire longuement occultée par le régime communiste, b) reconnaître sa nature réelle, et c) tirer la leçon de cette catastrophe humaine
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Message par Syfou Ven 21 Mai - 16:20

A titre indicatif Arrow

L'Ukraine (Україна [ukrɑˈjinɑ] en ukrainien) est un État d'Europe de l'Est, le deuxième plus grand d'Europe. Elle est bordée par la mer Noire au sud, frontalière avec la Russie au nord et à l'est, la Biélorussie au nord, la Pologne, la Slovaquie et la Hongrie à l'ouest et finalement par la Roumanie et la Moldavie au sud.

L'Ukraine fut le foyer du premier État slave oriental, fondé par des Scandinaves: la Rous' de Kiev (appelée ainsi dans les écrits occidentaux Ruthénie), qui durant les Xe et XIe siècles fut l'État le plus grand et le plus puissant d'Europe


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